Champion du monde 2012 et 2013, Jeffrey Herlings a admis hier qu’en effet, comme le laissaient entendre diverses rumeurs, il ne serait pas complètement remis pour l’ouverture de la campagne 2015, à Losail au Qatar le 28 février prochain. Ceci dans la mesure où il vient seulement de reprendre le guidon de sa KTM Red Bull ce mardi, deux mois après avoir dû repasser sur le billard pour qu’on lui retire la plaque et les vis qui avaient permis de réparer son fémur gauche fracturé au mois de juillet, une blessure qui lui a coûté un troisième titre mondial consécutif…
« J’ai repris mardi et je dois avouer que j’étais un peu raide. C’était sympa parce que je n’avais pas roulé depuis longtemps, mais pour tout dire je me sentais à peu près comme si je venais de passer sous un train ! ».
Ayant, en accord avec KTM, choisi d’être réopéré au plus vite, le Néerlandais savait très bien que ce ne serait pas sans conséquences sur son début de saison 2015 et qu’il arriverait au Qatar en petite forme, comme ce fut déjà le cas l’an dernier.
« La ferraille posée au-dessus du genou fin juillet me faisait souffrir, j’avais mal dans toute la cuisse, jusqu’à la hanche. J’étais gêné dès que je voulais m’entraîner. Je suis allé en Autriche et j’en ai discuté avec Pit (Beirer, le directeur de la compétition chez KTM). Nous sommes allés trouver le médecin et quand nous lui avons demandé s’il était possible de retirer l’épingle et les vis le plus vite possible, il a répondu par l’affirmative, mais que la guérison prendrait ensuite deux à trois mois. Nous avons donc dit banco, calculant qu’au bout de deux mois il me resterait encore trois ou quatre semaines qui devraient suffire pour préparer la reprise au Grand Prix du Qatar ».
Ce genre d’opération, on les programme d’habitude en fin de saison, mais là il y avait urgence : « Nous savions que je ne serais pas à 100% au premier GP, mais nous avons pris le risque. C’était juste, mais a priori j’avais le temps, donc je me suis fait réopérer. Pit était OK, il a bien compris que de toutes façons c’était mieux d’enlever tout ça, que ça pouvait aussi représenter un risque, que si jamais je chutais à nouveau sur cette jambe la plaque pouvait infliger des dégâts irrémédiables à l’os… Donc voilà, j’ai été réopéré il y a deux mois et je n’ai plus mal. Bien sûr, je ne suis pas encore le Jeffrey d’avant juillet, mais ça va revenir ! ».
Il reste aujourd’hui trois semaines au Hollandais pour retrouver sa vitesse, sa confiance et sa condition avant le premier Grand Prix au Qatar, immédiatement suivi huit jours plus tard par une virée à Nakhonchaisri en Thaïlande. Malgré ce planning serré, pas trace de panique du côté de l’ex-champion du monde : « Cela fait six mois que je ne me suis pas donné à fond sur la moto et je sais fort bien que si j’essayais aujourd’hui d’enquiller deux manches de trente-cinq minutes mon corps ne le supporterait pas », concède-t-il. « J’ai réussi à courir un peu, à nager, à faire du vélo, mais je n’ai pas sollicité mes muscles comme je le fais à moto. Alors je vais voir comment ça se passe en selle et travailler en conséquence ».
« La saison dernière j’ai appris à quel point un championnat peut être long ! Je devrai donc tâcher de « survivre » au Qatar et en Thaïlande et y prendre juste le plus de points possible ».
Ce ne sera pas la première fois que Jeffrey défiera la douleur et qu’il devra se montrer à la hauteur de son statut de champion exceptionnel, histoire de reprendre là où il l’a laissé l’été dernier son incroyable parcours victorieux en championnat MX2. Une ère de totale domination démarrée début 2013 et poursuivie jusqu’au dernier GP 2014 au Mexique où, terriblement diminué, il a dû lors de l’ultime manche de l’année rendre les armes face à Jordi Tixier. Ses adversaires connaissent sa force de caractère et reconnaissent son courage, physique et mental : ils savent à qui ils ont affaire. Après tout ne s’était-il pas imposé lors des premières épreuves overseas l’an passé malgré une préparation hivernale tronquée, déjà, à cause d’une blessure au pied ? Cependant, tous les revers qu’il a dû admettre depuis l’été dernier, cette fracture de la jambe et ses multiples conséquences ont sérieusement mis à mal la réputation d’invincibilité absolue du jeune homme originaire de Geldrop, dans la banlieue d’Eindhoven (juste entre Valkenswaard et… Lierop !).
Et qui plus est, au-delà de sa propre reconstruction, d’une condition physique et mentale de champion à restaurer, Jeffrey a encore un autre challenge à relever, au plan mécanique celui-ci : découvrir la machine sur laquelle il doit rouler cette année. En l’occurrence la KTM 250 SX-F pré-production 2016, une toute nouvelle moto qu’il ne connaît pas encore et dont il va devoir assurer sa part de développement, bien entendu. Un engin qui d’ici les premiers GP doit devenir une imparable bête à gagner entre les mains de son pilote officiel numéro un. « En vérité, j’étais monté dessus avant ma chute de juillet, mais il s’agissait juste d’une simple prise de contact… Et puis ça ne date pas d’hier ! Mais j’ai eu des échos, on m’a dit que la dernière version à ce jour est carrément redoutable. Je pense que les gens qui l’ont vue en action dimanche dernier à l’occasion de la première épreuve des championnats d’Italie ont pu mesurer à quel point cette machine est dans le coup, puisque Pauls Jonass a gagné en MX2 à son guidon. Moi, j’en disposerai à partir de la fin de la semaine, ce qui m’excite pas mal a priori ! Toutefois, dans la mesure où il ne reste que très peu de temps pour passer en revue toutes les possibilités offertes par une machine aussi inédite, tant au point de vue du moteur que du châssis, bref pour assurer complètement un travail de mise au point digne de ce nom, cela signifie aussi que nous n’aurons pas nécessairement le set-up idéal dès les premières courses au Qatar et en Thaïlande… ».
Info © Adam Wheeler www.ontrackoffroad.com – Photos Ray Archer