La filière
Educatif, minime, cadet, junior, élite, Europe et plus si… la qualité de la filière française a fait ses preuves. Pour avoir vu ce qui se faisait un peu partout en Europe, le minivert est LA meilleure école, le cadet a LE meilleur niveau (du moins le plus homogène) et la décision de conserver l’exclusivité du 2 temps au Junior est judicieuse.
Parce qu’avant de vouloir courir il faut d’abord apprendre à marcher…
Si Krestinov et Magï (estoniens), Desalle, Graulus et Van Horebeek (belges), Tonus (suisse) et bien d’autres font (ou ont fait) le déplacement pendant des années, c’est (ou c’était) pas seulement pour la gastronomie locale…
Sauf erreur de ma part, tous les champions Cadet et Junior de 2000 à 2004 ont scoré en mondial cette année.
Le savoir
JJB, Hauquier, Adams, Finot, DV père, OR, JV, Kervella,…
Alors on aime ou on aime pas, pédagogues ou plus directs, business or not business mais c’est pas grave… Chacun sa méthode et le résultat est là, parce que le savoir, ça n’a pas de prix !
Conserver et transmettre le savoir à la relève, telle est l’une des grandes forces de la France (et c’est aussi le cas dans bien d’autres sports).
Quinze ans après les tricolores, les « autres » ont enfin compris l’utilité de la chose, le trio Barto/Stevanini/Traversini se chargeant des espoirs ritals et le duo Geisbers/VDB, de la succession batave.
Pendant ce temps là, Jobé fait rouler des Cheik arabes dans les dunes et Dobb se sucre sur les contrats d’un gamin de 18 ans…
Le chrono
Plus qu’une spécialité franco-italienne, une véritable « culture chrono ».
Les français commencent à rouler au chrono à partir du minime, soit 2ème année 85cc (entre 12 et 13 ans). Jusqu’à il y a peu, les belges et les hollandais découvraient l’usage petits boîtiers oranges à fixer derrière la plaque numéro en participant à leur premier Europe 125cc…
Le schéma Junior/Elite s’y prête tout particulièrement bien puisque chaque séance (2 libres, 1chrono, 1 warm up) sert de prétexte à l’exercice, soit 4 occasions pour les pilotes d’affoler l’horloge (c’est 2 fois plus qu’en championnat d’Italie et 4 fois plus qu’en championnat d’Angleterre).
Parce qu’avant de vouloir rouler vite et longtemps, il faut d’abord rouler vite…
Les terrains
Là aussi, la France a réussi à se moderniser.
Exit les terrains bétons à plat sans appuis, les calendars de ces dernières saisons font la part belle aux grosses ornières et aux obstacles techniques.
La griffe ou la rotative font désormais partie de l’attirail indispensable à tout organisateur qui se respecte…
Les pré appels et les dévers dans la craie au minivert, les ornières de Romagné et de La Chapelle, le sable de Bitche, les sauts techniques de Thomer, les trous de Lacapelle ou les pains de sucre qui implorent de se faire gratter l’appel au repose pieds (Brou, Donnery). Toute la panoplie du pilotage moderne et des « conditions courses GP » est passée en revue…
Ailleurs, y’a du bon aussi mais c’est toujours plus typé et moins complet.
GP track = technique + « conditions difficiles »
Les teams et l’industrie
On ne va pas revenir sur chacun d’entre eux mais rares sont les nations qui peuvent affirmer aligner autant de teams dans le paddock du mondial, qui plus est sans vendre les guidons aux pilotes les plus offrants…
Importateurs, équipementiers, revendeurs ou mécènes, nombreux sont ceux qui s’investissent, chacun à son échelle, et tous sont réunis sous l’égide de la passion.
Le marché français a quand même, à l’échelle européenne, un potentiel non négligeable ce qui permet à l’industrie de redistribuer et de faire valoir ses produits à travers la compétition de haut niveau.
A noter la touche patriotique puisque tous les teams français ne font rouler que des pilotes tricolores sous contrats avec des équipementiers français, une exclu ! Ou pourquoi aller chercher ailleurs quand on a tout ce qu’il faut chez soi…
L’effet « génération »
On le remarque dans tous les sports, la réussite d’une nation dans une discipline résulte souvent d’une génération montante tirée par un « leader ». Et même si notre sport est individualiste à l’extrême, la réussite des uns motive les autres, l’orgueil des minots et l’effet de groupe créant ainsi une stimulation indéniable au sein d’un collectif. Christophe et la réussite qu’il connaît actuellement sert de modèle à toute une génération, au même titre que le début de saison de Frossard inspire une poignée de top Euro et la grosse progression de Paulin donne des idées aux juniors les plus ambitieux. De quoi motiver à tous les niveaux…
Autre facteur, le pôle EDF, véritable « source de talents » engendre une émulation positive. Il a permis aux Pourcel, Aubin et Tarroux de se tirer mutuellement, ce dernier ayant tiré Frossard, qui a tiré Vongsana, qui tire Larrieu, qui tirera Clermont et Tixier qui tireront Ferrandys, etc etc, suite sans fin…
Le SX
Alors là, pour ne pas reconnaître les bienfaits d’une cure hivernale de Supercross, il faut vraiment avoir les œillères fermées au maximum. Vitesse, agressivité, technique et timing (pour n’aborder que l’aspect technique de la chose), tout le cocktail pour gagner une poignée de secondes pendant que les autres se « préservent »… Suffit de s’inspirer des ricains pour comprendre que les deux disciplines sont complémentaires.
Et même en Grand Prix, que ce soit dans le bois de Lierop, sur l’esplanade à Namur, dans les vagues en Irlande ou même sur un tracé bien old school façon Teutschenthal, inutile d’attendre la fin du premier essai libre pour dénombrer tous ceux qui roulent en salle pendant l’hiver, ça crève les yeux !
Le SX pour les 85cc est une bonne chose en soi, à conditions que les kids soient bien encadrés et que les difficultés soient abordées de manière progressive et calculée. La France a toutes les cartes en main (infrastructures et savoir) pour que cet exercice soit une réussite. Un atout supplémentaire, un de plus…
La fédé
Au même titre que la santé économique d’une société est en étroite relation avec la qualité du travail de ses gestionnaires, la réussite sportive d’une génération est étroitement liée avec la fédération qui chapeaute la discipline.
Alors bien sûr tout n’est pas parfait, et même si y’a toujours un barbu bedonnant pour vérifier si l’aileron de votre casque est homologué, même si la moyenne d’âge lors des conseils d’administration flirte avec le troisième âge et même si le prix de votre licence augmente un peu plus chaque année, dites vous bien que l’herbe n’est pas forcément plus verte ailleurs, bien loin de là…
Teutschenthal le week end prochain ou le Grand Prix le plus « french favorable » de la saison. 17 tricolores derrière la grille, 2 français sur le podium du MX2, une première victoire de manche en MX1 et une tricolore dans le top-3 du mondial féminin, la nouvelle vague française a les moyens de ses ambitions et risque bien de faire des dégâts chez les teutons…
Texte © Yves « Holeshot » De Vlaminck – Photos © Mx2k.com