Dorian Juin est un pilote qui roule super fort, plus fort que 99,9% d’entre nous. Un de ces gars qui terrorisent la ligue, et sur qui tous les regards se tournent quand il est sur un circuit à l’entraînement. La preuve, il s’est qualifié ce week-end pour le championnat de France Elite MX1 peut-être le plus relevé de l’histoire. Sauf que là, au milieu d’un plateau d’une telle densité, Dorian est redevenu un simple mortel. Mais qui a vécu l’expérience d’une vie !
« On peut se rappeler ce soir ? Je suis au boulot, là. J’ai commencé à 7 h donc je ne devrais pas finir trop tard, vers 16h 30/16 h 45. » Lundi matin, Dorian Juin n’avait pas que ça à faire que de poster des stories #décrassage #recovery sur son IG. Après un week-end parmi les étoiles, il est revenu à la réalité. Celle d’un couvreur à son compte en tant qu’auto-entrepreneur. Lui, le scandale des 400 € de primes, il en est loin, puisque ses résultats lui ont permis de toucher… zéro. Merci d’être venu. Au moins, il lui reste des souvenirs. Ainsi, loin du faste des Jeffrey, Seewer, Febvre, Coldenhoff et cie, il existe une autre catégorie de pilotes assez rapides pour remplir la grille auprès des premiers cités, mais à la vie toute différente. C’est pourquoi on a voulu en savoir plus sur le week-end de Dorian Juin, le #978 sur une Husqvarna 450 TC.
“Oui, j’ai commencé tôt ce matin. En ce moment il fait beau donc on essaye de commencer de bonne heure. Il faut bosser pour avoir de l’argent, sinon pas de moto… C’est aussi pour ça qu’il ne faut pas se blesser sur la course, parce que sinon, je n’ai plus de revenus ! Ça fait quoi de partager la piste avec Herlings ? C’est sympa ! Pour ma part, c’est la première fois que je participe à une course avec un tel plateau et un niveau aussi élevé. Il manquait le HRC, Prado, Cairoli et on avait un MXGP ! Pour moi, le gros objectif c’était de passer la qualif, ce que je suis très content d’avoir réussi à faire. C’est sûr que ce sont des pilotes qu’on n’a pas l’habitude de côtoyer ! Je termine dernier qualifié dans le groupe B, à 15 secondes de Jeffrey. Oui, ça fait un peu mal, ça pique, mais c’est incomparable. Tous ces tops ont commencé la moto très jeune, ont tout de suite été bons et se sont retrouvés aidés, soutenus. La plupart n’ont jamais travaillé, dans le sens « vrai » travail, et souvent n’ont pas été très longtemps à l’école. Tant mieux pour eux, je leur tire mon chapeau. Ils ont eu le don et le courage d’y arriver. Moi, honnêtement, je ne pourrais pas être pilote pro. C’est trop de contraintes et de risques par rapport à ce que ça peut rapporter.
J’ai eu la chance de partir le premier aux chronos, avec Seewer et Coldenhoff derrière moi. Seewer m’a passé sur la table du haut, avant le triple en descente. Quand tu vois le nom sur le maillot, c’est sûr que ça fait quelque chose ! C’est magnifique, je n’aurais jamais pensé que ça m’arrive un jour. J’ai essayé de le suivre, parce que je n’étais pas dedans, et partir avec eux, ça m’a obligé à me bouger, dans un sens, pour prendre un peu de rythme.
Je me suis rendu compte d’une chose en roulant avec eux, c’est que leurs conditions de travail sont très différentes des nôtres. Parce que l’état de la piste en fin de journée, c’est inimaginable. Un champ de mines ! Et plus c’est défoncé, plus ils vont vite ! De l’extérieur, on ne se rend pas bien compte, ça fait un beau circuit. Tu te mets sur la pelouse en face, tu vois tout, c’est magnifique ! Mais quand tu es sur la piste, dans les conditions réelles en manche, pfff… Ça rigole pas. Il n’y a pas un endroit propre. En fait, pour résumer, tu sors de l’ornière du virage, tu vises une ornière sur un appel et en l’air tu vises une ornière pour atterrir. Et au freinage, il y a des trous dans les ornières…. C’est chaud. Je n’avais jamais roulé sur un terrain aussi détruit et difficile. Ce n’est pas pour dénigrer les pilotes que je qualifierais de « semi-pro » comme moi, mais ce type de terrain, c’est même pas fait pour nous, en fait. Tu peux très vite aller à l’erreur. C’est peut-être d’ailleurs la seule fois que je connaîtrais ça. Du coup, c’est une expérience qui est quand même intéressante. Ne serait-ce aussi qu’au niveau des départs. J’avais l’impression de bien sortir à l’entraînement, la moto elle marche, mais je suis arrivé dans les derniers aux deux manches au bout de la ligne droite. OK, ils ont aussi des meilleures motos, mais une 450 ça marche quoiqu’il arrive. Là, on a vu qu’il n’y a rien à faire…
Un moment, en deuxième manche Herlings et Febvre sont arrivés derrière moi. Mais ils vont tellement vite que tu ne les vois pas arriver ! Moi, j’étais sec, et en plus, ce n’est pas si facile de changer de trace, donc j’étais sur la trajectoire principale et j’ai peut-être un peu gêné. Mon père était à côté d’un groupe de supporters de Febvre qui gueulait « Dégage ! » comme moi je peux le faire au Motocross des Nations ou ailleurs en tant que spectateur, mais ils ne se rendent pas compte que même ça, c’est pas si facile ! Les mecs enchaînent à Mach 2 triple/ornières/virages/saut… ça ne s’arrête jamais ! Les vagues, mon pauvre, tu ne comprends même pas comment ils font pour passer si vite. Je n’avais jamais eu la sensation de gêner un pilote jusqu’à dimanche. Ça m’a fait penser à quand il m’arrive de mettre un tour à des pilotes en Ligue, où il y a quand même des différences de niveau importantes. C’est une bonne leçon d’humilité. Quand tu vois Anthony Bourdon qui fait 21e, alors qu’il est champion Elite 250 l’an dernier. Donc, c’est sûr que de l’extérieur de la piste, tu dois avoir l’impression qu’on est à l’arrêt complet !
En plus, je dois reconnaître que c’est ma première année en 450, et je n’ai pas le feeling avec cette moto. Je n’étais pas à « mon » niveau, mais au moins j’ai réussi à me qualifier et c’est une belle satisfaction d’avoir pu au moins une fois faire deux manches avec les pilotes que tu vois d’habitude à la télé. Là, rien que les voir en pré-grille, ça fait bizarre… Tu te retrouves avec Herlings, Seewer, Coldenhoff, Febvre… Jasikonis, c’est la première fois que je le voyais en vrai, le gars il fait 2 m 50 ! Un truc de fou ! Ce n’est que du bonus, que des bons souvenirs. Ça reste mon meilleur moment de moto jusque là, oui. C’est sûrement la dernière fois que ça m’arrivera, de rouler avec un tel plateau. Une sacrée expérience. Je me suis même vu à la télé sur le live FB après, c’est top. Comme si j’étais en MXGP ! »
Par Rich’, photos DJ
Bonjour tu as bien résumé la chose entre le travail et le plaisir envoie la possibilité de faire les deux est énorme et faire ce que tu as fait ce week-end c’est magique La vie est trop courte et le faite d’avoir vécu ça est un super choses félicitations à toi pour tes qualifications et que du bonheur pour la suite
Excellent. Jasikonis 2.50 m, mais je comprends la position du gars, lundi au boulot, il a pu dire à ses collègues, hier j’ai roulé avec des champions du monde, et c’était retransmis en live sur FB et c’était bon, j’ai pas gagné, mais je l’ai fait, je pense que Seb Pérez a du penser pareil.
Tout d’abord, bravo au pilote pour la qualif’, chapeau, il fallait passer!
Content pour lui et pour cette expérience dont il peut être fier.
Et bien sur, encore une excellente initiative de Richard de lui avoir donné la parole et de lui faire partager ces moments avec nous!
Top!
Super reportage et remets tout en perspectives…
Moi quand je roulais, c’était quelqu’un comme Dorian que je prenais pour un extra terrestre 🙂 et était un vrai plaisir alors j’imagine ceux qu’il a du vivre !!! félicitation en tous cas !!!
Vraiment sympa cette évocation de l’ELITE vue pas un pilote amateur…
Merci Richard.
Bravo a toi !
Par contre j’hallucine ! Tu te qualifie en MX1 et tu reçois rien ! En 88 quand je faisais le chpt de France 125 national même le dernier il avait une paye ! Ah oui l’état a cru que l’on faisait du Black ? Mais vous savez combien ça nous coûte ce sport !
Heureux d’avoir connu les années 80 / 90.
80 euros d’engagement et 60 euros si qualif. Sans les primes lissées, en faisant 16 et 16 euros Idem…. moins 20e