KTM a fait parler ses trois stars du MXGP pour nous donner de leurs nouvelles, dans une période où les dites stars ne sont effectivement pas très accessibles aux différents médias. Voici donc ce que Tony Cairoli, Jeffrey Herlings et Jorge Prado ont sur le coeur à l’aube d’une saison décisive pour chacun d’eux, mais pour des raisons différentes, pour ne pas opposées, entre le vieux lion qui rugit encore, le loup solitaire et le jeune chien fou.
Tony Cairoli
En treize ans de présence en MXGP, Tony Cairoli n’est descendu que deux fois du podium, en 2015 (7e) et 2019 (10e), à chaque fois à cause de blessures. Cette saison, Tony part à la conquête de son dixième titre mondial et espère augmenter son total de 92 victoires en GP.
Tony, tu as subi une opération du genou à la fin 2020 et tu n’as pu reprendre la moto que fin février. Comment te sens-tu ?
Le genou va bien, et j’ai repris la moto doucement. J’ai donné la priorité à retrouver le physique dans la première phase de récupération après l’opération. Aussi parce qu’on est toujours dans l’incertitude à propos de l’ouverture de la saison. Il n’y a pas de raison de se presser. Mais ça va, je me sens bien.
La question que tout le monde se pose : quand vas-tu décider si cette année est ta dernière ou non ?
Ça dépendra des résultats, bien sûr, et si je me sens compétitif. Je veux voir si je peux encore m’améliorer, mais je sais que mon niveau de performance va avoir du mal à monter. Ça dépend beaucoup de mon genou et de ma condition physique. C’est pour ça que je ne sais pas trop où j’en suis niveau vitesse et sensation, parce que je ne peux pas pousser mes limites en ce moment à cause de la blessure. L’année dernière a été très difficile pour moi mais je pense que si mon genou va un peu mieux, je peux me battre pour le titre. C’est mon but, et la suite de ma carrière dépend de ça.
Tu as été un mentor pour Jorge Prado et maintenant pour Mattia Guadagnini. Comment ça se passe avec lui, sachant que l’Italie a maintenant un nouvel espoir ?
Il a pas mal de pression en ce moment. Après son beau parcours en EMX250, on attend beaucoup de lui. Ça ne va pas être facile, j’ai connu sa position. Mais ça se passe bien, il a beaucoup travaillé. Les première courses vont être compliquées, mais une fois qu’il aura trouvé le rythme, les résultats devraient arriver.
Qui seront les favoris en 2021 ?
Je pense qu’on verra les mêmes noms que les années précédentes pour le titre, mais encore plus de monde pour les victoires de GP, avec l’arrivée de Olsen ou Watson. C’est le moment aussi pour Jorge Pardo de montrer son talent en se battant pour le titre, et bien sûr Tim Gajser, Jeffrey Herlings et moi. Seewer et Coldenhoff seront là aussi. Il y a beaucoup de monde pour le titre, et encore plus pour aller chercher des victoires !
Ton habilité à aller chercher des championnats est indiscutable depuis quinze ans, mais crois-tu encore avoir la vitesse pour remporter des courses ?
Tout dépend de mon genou, encore une fois. L’an dernier, j’ai commencé la saison blessé de l’épaule, et quand elle a été mieux c’était mon genou ! Je n’ai jamais pu rouler à mon meilleur niveau. Si je suis bien physiquement, je sais que je peux gagner des courses, même si le championnat est mon but principal.
Jeffrey Herlings
Pur produit KTM depuis son arrivée en GP en 2010, Jeffrey Herlings pèse quatre titres mondiaux et 90 victoires en GP, soit le troisième sur la liste. À 26 ans et après deux ans de frustration à cause de blessures, le #84 est bien décidé à redevenir le boss du MXGP.
Jeffrey, comment va la santé ? Plus de métal dans le corps ou de difficultés physiques ?
Non, plus rien dans le corps, heureusement ! Mon pied est bien mieux qu’il ne l’était, même s’il n’est pas totalement guéri et aussi « bon » que l’autre. Ça me dérange un peu, mais pas quand je roule. J’ai parfois mal après, c’est tout. Physiquement, je ne suis pas au top, mais à ce stade, je ne veux pas l’être puisqu’on n’est pas 100% sûr de quand les courses vont reprendre à cause de la pandémie. On espère tous mi-juin, mais c’est dur physiquement et mentalement de savoir si on va reprendre ou non. En ce moment, je roule juste trois ou quatre fois par semaine et chaque jour je fais une ou maximum deux séances de sport pour garder mon poids sous contrôle. Quand je serai certain de la date de reprise, on pourra y aller à fond.
Tu as un insatiable désir de victoire, mais après tes blessures en 2019 et 2020, une part de ta motivation n’est-elle pas de rester entier toute la saison ?
Oui, c’est évidemment un gros objectif de terminer la saison. Je dois être présent à chaque fois, même si ça signifie que je ne serais pas devant à tous le temps. Si je suis derrière la grille à chaque course, avec un peu de chance je ne serai pas loin du podium à la fin de la saison.
Le GP de Hollande à Oss, qu’en penses-tu ?
D’abord, c’est vraiment dommage de ne plus avoir Valkenswaard. C’était un pilier du calendrier. Depuis 2010, j’y ai gagné neuf fois, et terminé dix fois sur le podium, donc ce GP occupe une grande place dans mon cœur. Oss est un beau terrain, proche de ma maison ! Ce n’est pas un terrain hollandais typique très sablonneux mais c’est un endroit cool et bien pour la visibilité des spectateurs.
Qui va surprendre parmi tes rivaux en 2021 ?
Je pense qu’on va retrouver les mêmes, c’est juste une année différente… Jorge Pardo va se mêler à la fête, et les habituels Tim Gajser, Romain Febvre et Tony Cairoli.
Tu pourrais te rapprocher du record des 101 victoires cette saison, est-ce un objectif ?
Carrément, c’est un objectif que j’ai en tête. Si je fais une saison comme en 2018, je vais même le dépasser ! C’était une saison de rêve. Je suis à 90 et j’ai 26 ans, donc je dirais que c’est réaliste. Je vais m’y employer.
Tu es le meilleur du monde dans le sable. Tu peux encore t’y améliorer ?
À n’importe quel âge, on peut progresser en trouvant des petits trucs, mais je ne pense pas pouvoir être meilleur dans le sable. 26 ans, ce n’est pas vieux, mais pas jeune non plus, et je ne me vois pas progresser encore à ce niveau. Je suis soit au sommet, ou déjà sur la pente descendante ! En 2018 je n’étais pas à mon top niveau mais déjà super bon dans le sable et j’ai quasiment tout gagné. Donc, pas sûr que ce soit possible d’être meilleur… Si déjà j’arrive à être au même niveau je serai heureux.
Jorge Prado
Avec déjà deux titres mondiaux à 20 ans et trois victoires en MXGP pour sa première année malgré deux blessures, Jorge Prado va attaquer avec confiance sa deuxième saison dans la catégorie.
Es-tu d’accord pour dire que tu as connu des hauts et des bas en 2020 ?
2020 a été une saison difficile, mais se blesser juste avant mes débuts en MXGP n’a pas aidé ! J’ai commencé sans entraînements ni testing. Malgré ça, j’ai eu des bons moments, surtout sur la fin. Quand j’ai retrouvé de la condition physique j’ai réussi à gagner des courses. J’ai même eu une petite ouverture pour le titre, donc je peux être satisfait. Globalement, je dirais que ça a été une bonne saison, mais j’aurais pu faire sans les deux blessures. Les meilleurs moments ont été mon premier podium, ma première victoire en Italie et celle en Espagne.
Quel est la principale leçon de cette saison 2020 ?
Commencer une saison blessé n’est jamais simple parce qu’on a besoin de temps sur la moto pour revenir au niveau. J’ai repoussé mes limites pendant la convalescence pour être le plus vite possible à 100%, donc je dirais que la leçon c’est celle-ci : que j’ai réussi à repousser mes limites physiques.
Tu t’es senti capable de maîtriser ta 450 à fond en fin de saison ?
C’est difficile de répondre parce que j’ai raté la période de préparation et la pré-saison. Ensuite on a dû s’arrêter à cause du Covid et deux semaines avant la reprise je me suis cassé la clavicule. J’ai roulé en Lettonie avec deux semaines de moto dans les jambes. En fin de saison, j’étais mieux et ça s’est vu dans les résultats, avec des bagarres pour la victoire. J’ai beaucoup appris pendant cette période, et j’ai vu où je devais progresser. Là, je me sens mieux maintenant que j’ai eu une vraie préparation en 450.
Tu sembles toujours confiant, mais cette période de ta fracture du fémur, est-ce la plus dure de ta carrière ?
Oui, 2020 a été une des plus dures. Je suis monté en 450 en tant que champion 250, avec des attentes et des objectifs, au moins personnels. Du coup, ça m’a secoué. La 450 est très sympa à rouler, mais quand tu dois attaquer pendant 30 minutes à fond, ce n’est pas vraiment simple… Il faut vraiment être en forme physiquement.
Qui va surprendre en 2021 ?
Humm, je ne sais pas. Jeffrey ! Cairoli sera bon, c’est sûr, et aussi Gajser et Febvre. Des surprises ? Dur à dire. Tous les ans, on se demande, et en fait à la fin c’est les mêmes devant. Je fais maintenant partie de ce groupe, selon moi. Je ne suis pas du genre à me mettre en avant, mais vu les résultats de l’an dernier, je me dis « cette année tu peux te battre pour le titre et tu dois être prêt. » Mon but est clair.
Tu voulais t’orienter vers le Supercross à un moment de ta carrière. Tu n’as que 20 ans, qu’en penses-tu aujourd’hui ?
Honnêtement, je suis vraiment concentré sur le MXGP : faire bien dans la catégorie et aller chercher ce titre. En regardant le SX à la télé, je me dis que ce doit être vraiment fun à essayer. Ce serait différent. Mais ce ne serait pas facile du tout d’y aller et de se battre pour le titre, c’est certain. Car non seulement il faut s’habituer à rouler en SX à ce niveau, mais aussi se battre en course, ce qui est encore différent. Je n’ai jamais roulé en course en SX de toute ma vie. Ce serait donc très dur ! Mais pour le moment, je me concentre uniquement sur le MXGP.
Par KTM, trad’ Rich’, photo [email protected]