Allez, Anaheim 1 est derrière nous, on va pouvoir se projeter sur la suite du championnat. Historiquement, le vainqueur de cette course n’est que rarement celui qui rafle la mise en fin de saison. Cela dit, on peut déjà tirer quelques enseignements de cette ouverture tant attendue !
Comme l’année dernière, c’est donc Justin Barcia qui l’emporte, ça ne vous aura pas échappé. Pourtant, il le dit lui-même, la situation n’a rien à voir. Armé d’une Yamaha relativement nouvelle, JB51 a passé l’hiver à bosser ses réglages. « Je n’ai jamais autant testé que cet hiver. Le staff Yamaha a fait tout ce que je demandais et la moto me convient beaucoup mieux que l’année dernière. » Le retour dans l’équipe de Sergio, un spécialiste châssis qui a notamment travaillé avec James Stewart, ne serait pas étranger au confort ressenti par Justin à A1. Vrai que sa Yam paraissait particulièrement plantée à la télé. En pleine confiance après un bon hiver, Barcia a réalisé une soirée parfaite : victoire en heat après un bon départ, victoire en finale après un bon départ… Et quand même une petite dose de BamBam avec notamment une belle sortie de piste suivie d’une attaque semi-suicide sur AC9 juste dans la foulée. « Du temps des 250, je l’aurais t-boné à coup sûr » se marrait en conférence de presse le sosie de Samy, le copain de Scooby-Doo. Qui portera donc la plaque rouge la semaine prochaine.
« Second de sa heat derrière Barcia, AC9 a du apprécier de passer deux fois le champion en titre, son ennemi de toujours Cooper Webb »
L’autre grand gagnant du week-end est évidemment Adam Cianciarulo. Le pilote Fox et rookie a explosé les chronos dès la première séance d’essai et n’a jamais ralenti la cadence, montrant au passage une maturité qu’on ne soupçonnait pas forcément. Pour autant, il faut se souvenir qu’Adam est de cette race des vainqueurs, lui qui a tout gagné tout depuis tout petit et qui avait remporté son premier SX en 250, avant la traversée du désert qu’on connait. Même sans fanfaronner avant la course, on sentait bien qu’il avait cette sorte de confiance « interne » qu’il pouvait faire bien. Il a fait encore mieux ! Second de sa heat derrière Barcia, AC a du apprécier de passer deux fois le champion en titre, son ennemi de toujours Cooper Webb. Et sans une glissade à l’accélération qui lui a fait perdre de l’élan avant un triple, il aurait sans doute gagné Anaheim 1. Une première pour un rookie depuis 2014 et son pote Ken Roczen… Reste à voir comment cette ouverture réussie va se traduire dès la semaine prochaine sur le terrain, mais on peut déjà considérer qu’Adam ne sera pas là pour faire de la figuration ou quelques coups d’éclats, mais qu’il pourrait bien jouer le championnat, à fortiori quand le champion en titre est un type qu’il a fessé méchamment toute sa carrière amateur. Autre dynamique intéressante, celle qui va animer l’auvent Kawasaki dans les semaines qui viennent. Chez les verts, la situation est claire depuis des lustres : un top pilote archi-payé, Eli Tomac en ce moment, et un autre qui ramasse les miettes. Ça a marché avec RV/Weimer, Tomac/Hahn, Tomac/Savatgy… Là, ça pourrait prendre une autre dimension entre AC et ET3, d’autant que le nouveau « crew chief », en gros le chef des mécanos chez Kawa, n’est autre qu’Oscar Widerman, l’ancien mécano de Ken Roczen et, surtout, un proche d’Adam. À suivre…
Décidément, il n’y a que des heureux sur le podium, puisque cette troisième place de Cooper Webb peut quasiment être considéré comme une victoire. Malade toute la semaine, stoppé complet aux qualifs (15e…), dépassé en heat, le nain grincheux de chez KTM est tout de même parvenu, après un départ moyen, à s’accrocher pour revenir à cette troisième place. Il va falloir aller le chercher, parce qu’il n’a visiblement pas l’intention de la jouer relax à la JA21 l’an dernier ! Seule ombre au tableau, le gars devant. On sait que les deux ne peuvent pas se blairer depuis des lustres, ce qui à un moment ou un autre devrait causer des étincelles. Pas forcément tout de suite, chacun jouant pour le moment la carte de l’apaisement, mais ça va venir. Tôt ou tard, ils vont chercher à partager la même ornière…
Mal parti, il est remonté proprement tout au long de la finale pour échouer à quelques mètres de Webb, brisant du même coup cette mauvaise « Baggett tradition »
Blake Baggett n’avait jamais fait mieux que 14e à Anaheim 1. Autant dire qu’il avait le sourire après la course. Mal parti, il est remonté proprement tout au long de la finale pour échouer à quelques mètres de Webb, brisant du même coup cette mauvaise « Baggett tradition ». Et qui se souvient du vainqueur de la deuxième course de l’année 2019 ? Yep, Blake Baggett.
Ça fait du bien de retrouver un peu du Jason Anderson 2018. On n’y est pas encore tout à fait, mais ça se rapproche ! Toujours dans son style cool et débraillé, JA21, parti derrière BB4, n’a certes pas réussi à le doubler mais est resté suffisamment au contact pour s’offrir un top 5 sur lequel il peut bâtir. Cette année, Jason doit regagner des courses et il en est conscient. Sur ce qu’on a vu samedi soir, c’est largement faisable. La vitesse et la condition physique sont là, ne manque plus qu’un départ devant.
On s’arrête là des satisfactions, parce que nos deux gars derrière sont les grands perdants du week-end. Ken Roczen, par exemple. Suffisamment bien parti pour jouer la gagne, il a passé un temps fou à se débarrasser de Friese puis Brayton, avant de jeter l’ancre vers la fin de course. Les « explications » ? Maladie de Claudia Pfeiffer ? Suspensions trop dures ? Mental en berne de voir CW1 devant lui ? Difficile à dire, mais Kenny a déçu. Encore une fois. Et ça fait mal pour les fans que nous sommes…
C’est ça, la magie Tomac, on ne sait jamais à quoi s’attendre…
Pas facile non plus d’être fan d’Eli Tomac. Arm pump, c’est la raison officielle de cette très timide 7e place, sans aucun panache à aucun moment. Et hop, déjà 10 points de perdus sur JB51. Ce qui ne veut pas dire qu’Eli n’est pas capable de coller vingt secondes à tout le monde la semaine prochaine avec exactement le même départ. C’est ça, la magie Tomac, on ne sait jamais à quoi s’attendre…
Toujours au chapitre déception, on peut ajouter Zach Osborne, lui aussi malade. Ils ne devraient pas se faire la bise le matin, à la Boulangerie… Zacho nous a également offert la première grosse pelle de la saison, heureusement sans gravité. Martin Davalos, Justin Bogle, Aaron Plessinger (on prononce Plessinegueur, au fait, c’est lui qui le dit !) sont également priés de vite revoir leur copie. Brayton a certes un peu reculé en finale, mais sa victoire en heat et son excellent début de course le sauve. En parlant de JB10, les Honda ont visiblement « trouvé des solutions » pour le départ, comme on dit à la télé. Y’avait plus de rouge devant qu’à une tablée de chasseurs à chaque départ, entre les officiels HRC et les MotoConcepts. Au passage, on notera la spectaculaire transformation de Justin Hill, le petit nouveau du team. Est-ce de côtoyer Vince Friese ou la perspective de voir ses émoluments radicalement diminuer, on ne sait pas, mais force est de constater que notre adepte du grunge était bien décidé à ne pas se laisser bousculer, quitte à block-passer tout ce qui bouge ! Au moins, il fait semblant de s’intéresser à ce qui se passe, contrairement à son année quasi-sabbatique l’an dernier chez JGR Suzuki. Ou alors ça venait du team, nos amis jaunes scorant un superbe 21/22 avec Freddy « Alex » Noren et Jimmy Decotis. À part ça, Chris Blose, qui se chauffe pour la côte est, a été en finale, tout comme Kyle Chisholm avec une moto presque stock. Et ce bon vieux Chad Reed a roulé sa 250e finale, achevée à une bien triste (pour lu) 18e place. C’est moche de vieillir.
Sérieusement, il pense à quoi, le gars ? Que personne ne va s’apercevoir qu’il a coupé un virage entier dans le plus grand calme ?
Chez les 250, Dylan Ferrandis peut se montrer légitimement déçu mais confiant. Vainqueur de sa heat en patron, il est remonté rapidement devant et aurait même peut-être pu jouer la victoire sans l’erreur d’Austin Forkner, qui, selon nous, l’a gêné et lui a coûté du temps. Comme l’an dernier, il va par contre falloir soigner les départs en finale, parce que son coéquipier est au point à ce niveau-là et on sait qu’il est du genre régulier. Plus en tout cas que l’autre grosse tête de… d’affiche, je veux dire, Austin Forkner. Lui aussi fait tout comme l’an dernier (sauf gagner) : énorme crash dès les qualifs, du grand n’importe quoi quand il est sous pression pour finir par couper la piste comme un lapin sous myxomatose traverse l’autoroute. Sérieusement, il pense à quoi, le gars ? Que personne ne va s’apercevoir qu’il a coupé un virage entier dans le plus grand calme ? Bref, il a été déclassé de deux places, et c’est un minimum. Mention pas si mal pour le retour de Christian Craig, toujours aussi élégant à voir rouler. Michael Mosiman a bien réagi après un passage par le LCQ, et devrait sous peu s’approcher du podium, même si la triplette Ferrandis/Cooper/Forkner paraît quand même un peu au-dessus. Bon entrée en matière aussi des rookies Derek Drake (8e) et Jett Lawrence (9e). J’attendais personnellement mieux de mon petit chouchou McAdoo, mais ça reste correcte pour une ouverture.
Au rayon WTF, comme seuls en sont capables les pilotes 250, on retiendra la soirée de Martin Castello, balayé deux fois en heat et en LCQ par un autre alors qu’il était qualifié. Quand ça ne veut pas… Jolie attaque kamikaze également pour la dernière place qualificative de Chris Howell sur le japonais Koga. Ironique, non ?
Luke Clout, Jay Wilson et Aaron Tanti ont en commun d’être australiens et de tenter leur chance sur la côte West. Et franchement, Clout (vice-champion d’Australie 450 derrière Brayton, quand même !) et Tanti ont montré une belle vitesse de pointe. À suivre, surtout si les whoops ne sont pas trop grosses.
C’est parti pour cette saison, on se retrouve dès la semaine prochaine pour un autre débrief sans (trop de) langue de bois. Pour finir, un gros big up à Automoto La Chaîne. Oui, il y a d’autres manières de voir la course avant, mais la mater tranquillement dans le canapé à l’heure du petit-dèj, c’est quand même vraiment pas mal. Quand on pense qu’il n’y a pas si longtemps, au début des années McGrath, c’était Moto Revue le jeudi pour avoir une brève avec les résultats ! Les millenials ne se rendront jamais compte de cette souffrance, mais les vieux savent !