Dixit Ganjaman
Ganjaman est un insider. Un gars qui promènent ses guêtres sur les terrains de cross depuis des années et qui connaît un paquet de personnes qui “pèsent” dans le milieu. Un personnage au poil pour avoir un avis éclairé sur la dernière édition du SX de Paris !
C’était l’année 2 du retour du SX de Bercy dans la capitale ! Oui, j’ai écrit Bercy. C’est comme ça, j’ai fourché, comme pas mal de mes congénères quarantenaires que j’ai croisé dimanche. Marrant, personne n’a réussi à s’y faire, aux différents nouveaux noms. À fortiori quand, comme c’est mon cas, on a assisté à tous les SX de Bercy, les vrais. Des deux premiers en 1984 jusqu’en… J’en sais rien, et j’ai la flemme de googler. Bon, là, au moins, c’est moins ridicule de l’appeler Bercy que quand ça se passait au Nord, là-bas, où il y a les corons, Pierre Bachelet et Dany Boon. Je n’y suis évidemment jamais allé, par pur snobisme intellectuel tout autant que pour exprimer mon mécontentement face à cette trahison. Imaginez un rallye qui s’appellerait Dakar et aurait lieu, je ne sais pas, genre en Amérique du Sud. N’importe nawak !
« Avoir le champion en titre US, c’est quand même un beau coup de la part des organisateurs. »
Bref, je disais, depuis le retour du SX dans la Ville Lumière, j’y suis retourné. L’an dernier, j’ai payé ma place et une pour le petit, 9 ans. Dix cette année, du coup, avec l’inflation. Franchement, c’était pas mal. Cette fois, j’ai décidé de tenter ma chance auprès de Dieu himself, Dirt D, pour avoir des pass, mon fils étant extrêmement motivé pour voir Jason Anderson, son ricain préféré, « en vrai. » Impossible avec des vrais places. Et bingo, DD a accepté. Impossible pour autant de rejoindre l’U Arena samedi, empêtré dans des soucis de garde d’enfants (#famillenombreuse). Sans compter les Jill & John, mais c’est une autre histoire.
Pass récupérés, on file vers la porte adéquate en ce dimanche ensoleillé, et on tombe direct sur Steve Matthes (mon idole), Justin Brayton et Cameron McAdoo qui, visiblement, vont manger. C’est tout l’avantage de ces pass VIP, on ne se retrouve pas dans la queue avec n’importe qui. Il n’y en a pas de queue, de toutes façons. Premier tour de paddock vite fait, et je tombe sur une vieille connaissance, DV, sous l’auvent Bud Racing. Qui m’explique que oui, MM25 va aller mieux dans les whoops et que non, ils ne bossent absolument pas que ça. Plutôt en forme, le DV, et content de son poulain sur la soirée de la veille, « même s’il reste du boulot, pleins de petits trucs ». Mon fils, lui, est impresionné que je connaisse le coach de Ferrandis. Je suis obligé de faire de l’histoire pour lui expliquer que lui aussi, le gars, là, il roulait avant d’être coach. Saloperie de gosse.
Smells like Hill spirit
Je tombe ensuite sur Xavier Morcillo le boss d’Amexio, ancien compagnon de Mini Vert, sponsor du team OB1 ou encore 114 Motorsports qui m’apprend que Peick et Arnaud Aubin se sont blessé, et que c’est même catastrophique pour Peick. Xavier m’annonce la face détruite, un fémur et peut-être le coma. Au final, c’est terrible, mais quand même moins grave. Voyez par vous-mêmes, mots clés : Peick-Paris, ça devrait suffire. D’ailleurs, un arrière de cadre complètement tordu gît au sol près de sa moto et de son sac Ogio qui a l’air abandonné. À côté, les frères Hill. Josh est dans le plâtre. Les deux, passionnés de Grunge en bons northwesterners qu’ils sont, ont totalement adopté le look, entre Deschiens et punks à chien, justement. Justin vient d’ailleurs de sortir un album grunge, ceci expliquant peut-être cela. Entre le 722, Bogle et lui, ça se tire la bourre à la fois sur le piste et dans les charts, décidément… On aperçoit vite fait Anderson, qui discute à la cool avec son collègue Osborne au cul du Sprinter Ice One HVA.
Passion McAdoo
Après une présentation des pilotes sans grand intérêt, sans beaucoup d’ambiance dans le stade et un Magnanou moins déchaîné que d’habitude (thanks God), arrive le premier temps fort, Zapata et sa machine volante. La mise en scène du casque oublié aux US est bidon, mais faut reconnaître que c’est complètement impressionnant, son truc. Le gars vole comme on en rêve, pour de vrai. Par contre, ça fait un bruit du diable et ça pue la mort. Bref, ça paraît pas dans l’air du temps niveau empreinte carbone, mais quel pied ça doit être ! Une belle surprise, en tout cas, dans la lignée des « Grands Bercy », la main de Johnny etc…
Passons aux courses, enfin ! Chez les SX2, pas de surprises. Les deux ricains sont largement au-dessus du lot, grâce surtout à « la » spécialité US, les whoops. Si l’excellent jeune Anthony Bourdon et le moins jeune Thomas Do ont bien chipé une manche chacun, la domination des ricains ne faisait pas un pli. Jace Owen, un top de l’Arenacross, est une machine à bien partir. Le gars était devant à chaque fois, et solide ensuite. Par contre, il en avait visiblement plein le Do en finale, au point de le laisser passer. Chelou.
La vraie bonne surprise du SX2, c’est Cameron McAdoo. Sur une moto qu’il découvrait et qui manquait visiblement de poneys, l’américain est systématiquement mal parti, ce qui nous a offert un festival d’attaque et de dépassements dans les whoops. Le plus rapide, largement, seulement vainqueur d’une course de tout le week-end ! Sous l’aile protectrice de son mentor Brayton, il pourrait faire pas mal l’an prochain chez Traders avec une Yam. J’attendais mieux du jeune Moreau. Mention bien pour Fonvieille, aussi. Et Bourdon, encore une fois. Style sobre, bien dans les whoops, il a de l’avenir, ce Bourdon. Pour le reste, pas vu grand chose, j’étais scotché sur McAdoo, avec qui il y avait de l’action non-stop. Je suis devenu fan.
Jason Fucking Anderson !
Enfin, les cadors du SX1 déboulent ! Pas à dire, les américains en SX, ça envoie. Grave, même. On n’est pas aux Nations, là… JA21 est incroyable dans la section qui va de la récep’ de FMX, avec son long virage à gauche, dans l’enchaînement suivant jusqu’après les whoops. C’est là qu’il a réussi la plupart de ses dépassements, avec une faculté à scrubber, mettre du rythme et de l’agressivité sur chaque jump de l’enchaînement. Vraiment impressionnant. On comprend pourquoi le gars est champion ! Et qu’on aime ou pas son style, il y a quelque chose. Perso, j’adore. #fande. Plus conventionnel, Brayton a été aussi très solide. En proie à des soucis d’embrayage le premier jour, il était mieux au départ le dimanche. Justin, c’est le Béthys moderne. Rien d’exceptionnel : bon départ, bonne vitesse, solide partout, et sur le podium à la fin. Champion d’Australie depuis la semaine dernière à Sydney, JB10 repart en Nouvelle Zélande pour ce week-end, avant de revenir à Genève la semaine d’après. OK, ça fait un mois de primes qui doivent équivaloir au PIB du Botswana, mais ça fait quand même beaucoup de déplacements… D’autant qu’il s’est tapé une pneumonie en Australie, et avait une bronchite à Paris.
Autres prétendants à une mention très bien, Zacho et Dylan. On commence par Osborne ? Franchement, je ne savais pas ce qu’il allait donner en SX 450. Style chelou, beaucoup d’attaque, 1 m 20 les bras levés, ça aide pas dans la discipline. Force est de constater que le Zacho n’est pas si mal que ça. Déjà, il part super bien, pas inutile en SX… Et même niveau vitesse, il n’était pas largué, au point d’être un des seuls à garder de temps en temps le rythme de son team mate. On verra si ce sera pareil là-bas, mais disons qu’il peut repartir de Paris avec de la confiance, le gars… Et combien de stars/pilotes d’usine se seraient arrêtés après avoir crevé de l’arrière en finale ? 90 % ? Pas Zacho, qui a fini comme il a pu. Preuve qu’il ne lâche rien, même quand ça ne compte pas. Classe.
Dylan l’américain
Passons à Ferrandis. Déjà, Matthes a rapporté qu’il avait demandé son maillot à Osborne à un Bercy quand il était minot. Signe du chemin parcouru… Globalement, je l’ai trouvé au top. Battant, rapide, fort dans les whoops, il est devenu un Américain, et un vrai. Aussi rapide, voir plus parfois, que des Anderson, Osborne ou Brayton, autant dire qu’à l’instar d’Osborne, ça doit donner confiance avant de repartir là-bas. OK, les terrains, les enjeux, les adversaires ne sont pas les mêmes, n’empêche qu’il y a de quoi être satisfait. DV lui a visiblement fait apprendre le langage des signes. Le Coachbra communique en effet par des grands gestes désordonnés du bord de la piste. Des gestes qui, de par son envergure (DV est grand, quand même!), donnent parfois l’impression qu’il veut s’envoler, tel un goéland pris dans une flaque d’huile… Au moins, ça marche. Ou Dylan se demande simplement ce qu’il peut bien vouloir lui dire… On ne le saura jamais.
Personne ne parle jamais de Vince Friese, à moins qu’il ne se la mette avec Peick. Un peu comme son coéquipier, le Vincent fait pourtant les choses dans l’ordre, avec des bons départs et une bonne vitesse. Ne lui en manque qu’un peu plus dans les whoops. Friese est quand même un bon mètre étalon pour le niveau US/Europe. Un mid-pack là-bas qui atomise menu n’importe quel euro en SX, et tranquille… Même Justin Hill, touché parait-il par l’accident de Peick, finit devant les euros/français, en se promenant littéralement toutes les courses. On sait, il est rapide, il l’a prouvé en Superpole, mais on a découvert un Justin bridé en manches (vous l’avez ?). Dommage, parce qu’il est aussi élégant sur la moto qu’il est débraillé en dehors. C’est tout dire.
Jeffrey dans la place !
Les seuls américains qui n’ont pas brillé sont Bowers et Lamay. Bowers, encore blessé au doigt, est gentiment venu cachetonner sans se faire mal, et Lamay est un gars qui, comme vous et moi, travaille la semaine et roule week-end, portant des palettes de Monster. Sur une moto inhabituelle dans un environnement qui l’est tout autant, il n’a pas fait de miracles. J’espère au moins qu’il s’est bien amusé, c’est cool si Lamay a ri…
Dur week-end pour Soubeyras, le plus apte de nos français normalement. Sûr que sa mésaventure avec Peick n’a pas du aider, mais on attendait tous mieux de lui. Pas vu grand chose des autres, j’étais trop fixé sur les américains. J’ai vu Hugo Basaula, par contre. Qui m’a donné l’impression que moi aussi, j’aurais pu rouler. C’est bien, des fois, de mettre un peu d’humain dans ce monde d’extra-terrestres. Un peu dangereux, peut-être, mais sympa.
En parlant d’ET, Jeffrey Herlings était présent en spectateur, ce qui a totalement emballé mon fils quand on l’a croisé. « Il fait moins grand que sur la moto » est la seule pensée qui lui est venue. Les enfants sont formidables, comme disait Jacques.
Bref, pour conclure, c’est quand même bien, cette course, on a de la chance qu’elle existe. Avoir le champion en titre US, c’est quand même un beau coup de la part des organisateurs. Mon fils et moi avons passé une bonne après-midi, entre les courses et Zapata. Et pour un « vieux » comme moi qui a vu des tonnes de Bercy, une cinquantaine de GP, une dizaine de MXdN et j’en passe, il m’arrive de me sentir un peu blasé. Là, honnêtement, quelques courses m’ont bien emballé. Le format propose certes trop de coupures, Francis est pénible et trop misogyne à mon goût, j’en ai absolument rien à faire du FMX ou des pit-bikes, mais je suis ressorti de là avec le sourire, mon fils encore plus. Paris gagné, donc. À l’année prochaine.
Par Ganjaman, photos DR