En Italie, en Hollande et en Espagne, pas moins de trois catégories en championnats d’Europe se sont ajoutées aux classes MXGP et MX2. Des meetings qui ont ainsi affiché complet de chez complet : certes les spectateurs en ont eu pour leur argent, mais cette abondance ne va pas non plus sans poser quelques problèmes collatéraux. Les sites des circuits de GP se sont retrouvés plus que bondés, notamment au niveau des paddocks et des accès, et les pistes elles-mêmes ont forcément souffert d’une telle utilisation à outrance, du matin au soir…
Le championnat d’Europe est au programme de certains GP depuis maintenant trois ans mais le succès croissant de l’EMX 250, qui se joue désormais sur neuf rounds, le décollage de l’EMX 300 réservé aux machines à moteur deux-temps, ainsi que le changement de format de une à deux manches par épreuve ont rendu les week-ends de Grands Prix européens définitivement… intenses, pour le moins. Pour les pilotes, la première conséquence est un raccourcissement évident du temps accordé à la maintenance des circuits, les organisateurs n’ayant plus suffisamment de latitude pour entretenir leur piste comme il le faudrait, histoire de corriger certains défauts, de réparer certains endroits trop abîmés, de remettre en état tel ou tel obstacle, ou même tout simplement répondre aux exigences de sécurité imposées par Youthstream et la FIM.
« Je ne pense pas que les pistes soient plus difficiles que par le passé, elles sont seulement un peu plus dangereuses dans la mesure où avec toutes ces catégories, ça fait vraiment beaucoup de motos qui les empruntent », explique Tony Cairoli. « Et tous ces concurrents creusent les circuits en dessinant des traces un peu bizarres, qui ne correspondent pas du tout à nos 450, à notre pilotage et à notre vitesse de passage, ainsi arrivons-nous sur des sauts ou des ornières qui pour nous peuvent s’avérer assez piégeux… Il faudrait pouvoir entretenir davantage les appels des sauts, par exemple, les remettre en état avant nos manches, de manière à ce qu’on se sente plus en sécurité et par conséquent qu’on produise un meilleur spectacle, en doublant plus facilement, de manière plus sûre… ».
« Les « Européens » ont du talent, mais ils roulent moins vite, c’est normal, du coup ils creusent des bosses plus rapprochées », ajoute Max Nagl. « La façon dont ils « usent » la piste ne nous convient pas, on va dire. C’est la même chose en championnat de Belgique : ça roule du matin au soir, les départs se succèdent sans arrêt et, à chaque fois que vous entrez en piste, vous êtes complètement perdu, tant elle a changé du tout au tout ! ».
Clément Desalle « Les organisateurs font de leur mieux, mais c’est mathématique, il y a trop de catégories. Ça devient vraiment dangereux et j’espère que les responsables vont s’en rendre compte »
« Je pense qu’il faut limiter le nombre de courses », ajoute le champion du monde sicilien. « Parce qu’il faut garder un certain laps de temps entre les manches pour prendre la peine d’entretenir le circuit. De toutes façons le spectacle y gagnera : sur un tracé bien entretenu vous aurez de meilleures courses, ce sera plus sympa que de voir des pilotes à la queue-leu-leu qui se suivent sans jamais se dépasser… ».
Clément Desalle lui aussi paraît perplexe devant cette augmentation effrénée du nombre de manches dans un week-end de Grand Prix : « Les organisateurs font de leur mieux, mais c’est mathématique, il y a trop de catégories. Ça devient vraiment dangereux et j’espère que les responsables vont s’en rendre compte ».
Les avantages sont nombreux, c’est pourquoi les championnats d’Europe ont été intégrés au programme des GP : faire rouler les jeunes espoirs sur les circuits les plus exigeants, leur offrir une merveilleuse opportunité de se forger un maximum d’expérience et de faire étalage de leur potentiel devant l’ensemble des décideurs responsables des teams officiels, sans même parler de l’aspect business (à travers les droits d’engagement) auquel Youthstream n’est pas insensible, c’est certain. Mais sans doute faudrait-il commencer par revoir le nombre d’épreuves par championnat, car l’état du circuit proposé aux principaux intéressés, les pilotes des catégories MXGP et MX2, doit absolument rester une priorité.
Bref, tout ceci paraît bien compliqué, comme le constate Nagl : « C’est très compliqué pour les organisateurs de refaire les pistes entre les manches. Ils ne peuvent pas non plus tout remettre à plat, ça n’aurait plus aucun intérêt. C’est un boulot très subtil, de savoir où et comment intervenir à bon escient. Par rapport à la sécurité des pilotes en premier lieu. Et, dans l’ensemble, je dirais que les responsables font généralement de leur mieux, même si tout n’est pas parfait… ».
Info Adam Wheeler www.ontrackoffroad.com – photo Valentin Guinberteau